Des cartes et des plans… pour remonter le temps

Sommaire

La recherche généalogique nous conduit à découvrir des communes, des paroisses ou des hameaux dont l'existence nous était jusqu'alors inconnue. Il est nécessaire de recourir aux cartes pour les situer. Si, dans un premier temps, la carte du département, d'un format réduit, figurant dans tout bon vieux calendrier des Postes suffit, rapidement l'envie prend de localiser de manière plus précise le lieu-dit, le moulin, le château ou la chapelle mentionnés dans un acte.

La carte de l'Institut Géographique National au 1/25 000 de la série bleue (un centimètre correspond à 250 mètres) devient alors l'outil indispensable sur lequel figure distinctement une ferme ou une maison isolée. Une fois assemblées, les 2000 cartes bleues constitueraient la plus grande carte de France réalisant un carré de quarante mètres de côté de Brest à Strasbourg et de Dunkerque à Perpignan.

Pour confronter la cartographie actuelle à celle des siècles passés il faut recourir :
- soit aux Cartes d'état-major au 1/80 000 dont la réalisation s'est étalée entre 1818 et 1881. Les 267 cartes d'état-major formeraient une carte de France de 12 mètres 50 sur 12 mètres 50,
- soit aux 180 Cartes de Cassini au 1/86 400 environ (voir illustration) - le système métrique n'était pas encore inventé - créées au XVIIIe siècle qui dessineraient une France tenant dans un carré de 11 mètres 50 de côté.

Remarquablement détaillée est la Carte des Chasses du Roy sur laquelle nous avons la chance de voir figurer La Norville et dont nous publions une illustration ci-dessous. L'intérêt de cette carte réside dans la précision des détails, dans l'indication des cultures, dans le tracé des chemins devenus de nos jours rues ou allées du Bois de la Garenne (nommée Garenne du Rossé), dans l'implantation des mares aujourd'hui disparues, des habitations et des fermes et, faut-il le croire, du terrain de foot-ball derrière la Garenne !

Encore plus précis est le Cadastre. Les plans cadastraux ont été établis pour chaque commune entre 1808 et 1850 donnant le détail des propriétés bâties et non bâties assorties d'indications précises permettant de les situer.

Pour les périodes plus anciennes il faut avoir un peu de chance et disposer de plans établis sous l'Ancien Régime en raison de la présence sur la paroisse d'un château, d'un monastère, d'une abbaye ou d'un autre ensemble architectural remarquable. C'est ainsi que nous disposons pour La Norville de plusieurs plans en raison de la présence du château qui se dresse au centre du village mais aussi de l'ancien château d'Arpajon situé à la Bretonnière. Les cartes anciennes des XVIe et XVIIe siècles, à l'image de celles qui figurent dans le CDROM diffusé par le C.D.I.P.* présentent un intérêt plus réduit pour le généalogiste, encore qu'elles permettent de suivre l'évolution historique des frontières entre les provinces et constituent un éléments d'illustration intéressant pour la présentation d'une généalogie.

Christian SOURDAINE

—————————

* Editeur du logiciel de généalogie GENEATIQUE

Sommaire


La carte de CASSINI

L'Académie des Sciences

Jusqu'au milieu du XVIIe siècle, il n'existait en France aucun organisme officiel chargé de la production de cartes. En 1661, Colbert, investi par Louis XIV de larges pouvoirs, prend en main la restauration du royaume. Il a besoin de connaître avec précision le territoire national, ses voies de communication et l'imbroglio des limites administratives. En 1663, il ordonne un inventaire des ressources et demande de rechercher les cartes les plus détaillées des provinces et généralités : elles ne sont parfois "qu'une mosaïque de lambeaux disparates", imprécises, car leurs auteurs, les "géographes de cabinet", répètent les mêmes erreurs en compilant les divers documents existants.

C'est dans ce contexte qu'en 1666, Colbert crée l'Académie des Sciences, puis, véritable décision politique, oriente l'action de celle-ci vers la recherche de méthodes cartographiques précises. Dans la séance du 23 mai 1668, son porte parole M. de Carcavi, demande aux académiciens "que l'on travaillast à faire des cartes géographiques de la France plus exactes que celles qui ont été faites jusqu'icy, et que la Compagnie prescrivist la manière dont se serviraient ceux qui seront employé à ce dessein". L'émergence de nouvelles méthodes cartographiques basées sur la triangulation était apparue, d'abord en Hollande avec Snellius, puis en Angleterre. La région parisienne sera le terrain privilégié des premiers essais français.

La "Carte Particulière des Environs de Paris par Messrs de l'Académie Royalle des Sciences en 1674" est la première œuvre qui a suivi la décision de 1668. Pour la première fois en France, elle est réalisée à partir d'un canevas de triangles..... Elle a été levée par l'ingénieur David du Vivier de 1668 à 1674, sous la direction des académiciens Roberval et l'abbé Jean Picard, puis gravée de 1671 à 1678 par F. de la Pointe (cuivres à la Chalcographie du Louvre).

C'est en marge de la réalisation de cette carte que l'Académie a effectué les travaux qui l'ont illustrée pour plus d'un siècle. Dès le début des levés, l'abbé Picard avait perçu l'utilité d'entreprendre une mesure exacte du degré de méridien terrestre. De 1668 à 1670, il dirige les opérations de la mesure de la Terre, fait perfectionner les instruments en réalisant un quart de cercle à lunettes et un secteur astronomique de 10 pieds. Sur la route de Fontainebleau, une base de 5663 toises est mesurée au moyen de perches de bois de 4 toises entre le moulin de Villejuif et le pavillon de Juvisy ; des pyramides élevées au XVIIIe siècle rappellent toujours le fait. Puis Picard mesure une chaîne de 13 triangles sur un arc de méridien entre Sourdon près d'Amiens et Malvoisine près de La Ferté-Allais, points extrêmes où des mesures astronomiques permettent de déduire leur différence de latitude. La longueur du degré méridien ainsi obtenue en 1670 est de 57 060 toises. Cette première mesure précise de la Terre marque le début de la géodésie française et assure à Picard une place exceptionnelle parmi ses fondateurs.

En 1669, Colbert avait fait venir à l'Académie un brillant astronome italien de l'université de Bologne, Jean-Dominique Cassini, premier d'une célèbre dynastie de quatre géographes au service de la cartographie française.

La Carte de Cassini ou de l'Académie.

La Norville sur la carte de CASSINI
La Norville sur la carte de CASSINI

Après la mort de Colbert en 1683 et jusqu'à la seconde moitié du XVIIIe siècle, l'Académie des Sciences avait pour unique vocation géographique la recherche de la forme de la Terre et la confection du canevas géométrique de la France : elle était un organisme de tutelle scientifique, à l'exclusion de toute production de carte de détail, domaine des géographes privés. Les Cassini vont poursuivre la triangulation de Picard, mesurant la Méridienne de l'Observatoire "prolongée", puis "vérifiée". La mire du Nord à Montmartre, et les obélisques d'Orveau et Manchecourt près de Malesherbes jalonnent toujours la Méridienne. En 1744, Cassini III de Thury achève la triangulation de 1er ordre de la France. En 1746, il est en Flandre pendant la guerre de Succession d'Autriche, collaborant avec des ingénieurs militaires au canevas géométrique et à des levés de la région. C'est le 7 juillet 1747, alors que Louis XV est à Raucoux où Cassini lui montre une carte des lieux de la victoire, que le roi émerveillé par les détails qu'il y trouve, prend la grande décision : "Je veux que la carte de mon royaume soit levée de même, je vous en charge, prévenez M. de Machault" contrôleur général des finances. Cette décision n'était pas un caprice, Cassini avait su y préparer le roi. Au siècle des lumières, les progrès de la connaissance nécessitaient d'inventorier les moindres objets de l'espace géographique en entreprenant la carte géométrique détaillée de l'ensemble de la France.

La dépense à supporter par l'État avait paru raisonnable : Cassini avait prévu 40 000 livres annuelles sur vingt ans pour 182 feuilles. Le problème sera celui de la production espérée de 10 publications en moyenne par an, cadence que l'on n'atteindra jamais. Les délais de préparation avant la production réelle avaient été sous-évalués : il faudra d'abord densifier la triangulation existante, recruter le personnel et le rendre opérationnel, enfin trouver et former des graveurs de qualité dans les spécialités de la lettre et du plan. Les premières feuilles à produire, celles de la région parisienne, devaient être particulièrement soignées, car le succès de l'entreprise en dépendait. Paris et Beauvais, très attendues par le roi et la cour, parurent enfin en 1756. Au château de Compiègne, l'accueil du roi fut mitigé, "il parut tout étonné de la précision du détail, surtout dans la forêt dont toutes les routes étaient marquées..." écrit Cassini. Mais en raison des délais et aussi parce que la guerre avait repris, Louis XV va lui couper les fonds "Mon pauvre Cassini, j'en suis bien fâché, mon contrôleur ne veut plus que je fasse continuer la carte". Dès la même année, encouragé par le roi, Cassini a recours à la privatisation pour financer son entreprise et fonde la "Société de la Carte de France". Cette association de 50 actionnaires semble avoir eu une gestion satisfaisante et, chose étonnante, elle réussit à équilibrer les dépenses par la vente des cartes et les aides des provinces. En 1757, les huit autres cartes couvrant la région Île-de-France étaient publiées. Pour le reste de la France, les levés s'achèveront en 1789, date à laquelle il ne restait plus qu'à graver les feuilles de Bretagne. Les cuivres et la plupart des minutes originales sont toujours à l'I.G.N.

La présentation de la carte en grandes feuilles rectangulaires, couvrant 40 000 sur 25 000 toises ou 90 sur 56 cm, est très sobre, chaque feuille "particulière" faisant partie de l'ensemble de la Carte de la France. On n'y trouve pas de cartouche de titre, ni légende, auteur ou date de publication. En dehors du cadre n'apparaissent qu'une double numérotation, aux angles les distances à la méridienne et à sa perpendiculaire et enfin l'échelle graphique en lieues, puis en mètres ajoutée après 1799. La carte est d'une lecture agréable, les graveurs ont été formés avec soin, les écritures sont bien gammées et élégantes, mais le manque d'homogénéité dans l'assemblage des feuilles était inévitable. À la même échelle du 1:86 400 que celle de du Vivier, la carte de Cassini est dans son contenu incomparablement supérieure. Pourtant en raison des progrès attendus, les critiques ne lui ont pas manqué. L'orographie n'avait guère progressé car, en l'absence de nivellement, le relief ne pouvait toujours être figuré que par des hachures approximatives. La faiblesse du réseau routier réduit aux voies principales était beaucoup plus critiquable. En fait, seule la feuille de Paris est convenable sur ce point : quelques zones vers Orsay, Montmorency, Colombes, fourmillent même de chemins secondaires que l'on semble avoir eu du mal à hiérarchiser. Les allées des forêts et parcs ont été particulièrement bien traitées. On notera qu'après la première édition et sur les tirages issus des cuivres actuels, de nombreuses rectifications routières ont été ajoutées, sans suppression du tracé antérieur. Ces additions, le plus souvent d'époque napoléonienne et parfois erronées, sont généralement les seules modifications intervenues dans les éditions postérieures. Dans la liste des objets topographiques à lever, Cassini, craignant de ne pouvoir être exhaustif, avait demandé d'ajouter "tous ceux dont la connaissance pouvait être de quelque utilité". Malgré quelques oublis, l'œuvre est d'un grand intérêt par sa richesse toponymique. On lui a surtout reproché de n'avoir pas représenté les lieux habités dans leur dimension réelle en plan : hormis les villes principales, on s'est contenté de signes conventionnels, simples figurines en élévation. Cassini s'en est justifié par l'échelle trop petite, se défendant d'avoir voulu dresser une carte topographique. Plus géodésien que topographe, son but était d'abord d'établir une carte géométrique et de mettre en place avec exactitude uniquement les objets essentiels.

Deux cartes dérivées ont été réalisées à partir de la carte de Cassini :
- la Carte de la France par Louis Capitaine, réduction au quart de la précédente, présentée en 1790 en 14 feuilles avec les limites des provinces et généralités, puis révisée dès la même année pour faire apparaître les départements. Elle a été révisée ensuite par le Dépôt de la Guerre.
- l'Atlas National de France par départements de Pierre-Grégoire Chanlaire et Pierre Dumez, publiées pour les trois anciens départements de notre région, après les décrets de janvier 1790 avec les chefs-lieux de districts et cantons.

Pour lire une Carte de CASSINI

Voici quelques explications des signes figurant sur une Carte de Cassini :

* Eglise, clocher à gauche avec une oriflamme = château
* Eglise, clocher à droite surmonté d'une flèche = hameau
* La même surmontée d'une croix = commanderie
* La même surmontée d'une crosse à gauche = abbaye
* Eglise, clocher entre deux pavillons, surmonté d'une croix = paroisse ou village
* La même , surmontée d'une crosse à droite = prieuré
* Maison, façade et croix à gauche = chapelle
* La même avec deux flèches = métairie ou ferme
* Maison, façade et flèche à droite, croix à gauche = fief
* La même, deux flèches et un drapeau = auberge
* Façade maison, porte et flèche = cabane
* La même, sans flèche = tuilerie
* La même, avec quatre ailes = moulin à vent
* Gibet triangulaire ou rectangulaire = justice
* Roue dentée = moulin à eau
* Calvaire sur monticule = croix
* Un rond surmonté d'une flèche = corps de garde
* Deux ovales = bourg
* Plan de rues = ville ordinaire
* La même avec fortification = ville fortifiée
* Sarments avec S inversés = vignes
* Deux traits parallèles = route de communication
* Le même avec pointillés = route pavée
* Pointillés parallèles = avenue
* Tirets parallèles = sentier
* Trait vertical sur toit d'un bâtiment = métairie ou ferme
* Le trait vertical est accompagné d'une petite croix = fief
* Trait vertical sur tour (rectangle en hauteur) = château
* Croix sur clocher (rectangle en hauteur) = paroisse
* Croix de Malte sur clocher = commanderie
* Croix en trident sur tour = prieuré
* Croix sur petit bâtiment = chapelle
* Un trait vertical sur petit v renversé = cabane

Sources : Extrait du « Bulletin du Cercle Généalogique du Languedoc » cité dans le N°59 de la « Revue française de Généalogie »

Sommaire


LA CARTE DES CHASSES DU ROY

La Carte des Chasses du Roi, plus exactement Carte Topographique des Environs de Versailles ou des Chasses Impériales, marque l'accomplissement des progrès de la cartographie au XVIIIe siècle. Par la précision et la multitude des détails planimétriques représentés, l'expression du relief figuré par de longues hachures et par la finesse de sa gravure, elle en est le chef-d'œuvre. Elle laisse loin derrière elle, par sa qualité, toutes les œuvres contemporaines françaises et étrangères. Levée de 1764 à 1774, elle a été gravée en 12 feuilles à l'échelle de 3 lignes pour 100 toises, soit 1/28 800.

La Norville se trouve à la jonction des feuilles d'Arpajon et de Corbeil.

Mantes Poissy St-Denis
Crespières Versailles Paris
Montfort- L'Amaury Chevreuse Sceaux
Rambouillet Arpajon Corbeil
La Norville sur la Carte des Chasses du Roy
La Norville sur la Carte des Chasses du Roy

La Carte des Chasses du Roy couvre une surface de 3400 km², intermédiaire entre celles des cartes de Dom Coutans et Delagrive. Centrée sur Versailles, elle a cependant l'inconvénient de ne pas dépasser Montfermeil à l'est.

Elle a connu une histoire mouvementée et bien des déboires au cours de sa longue réalisation de 1764 à 1807. Elle est l'œuvre du Dépôt de la Guerre (1688-1887), organisme créé par Louvois, chargé d'abord uniquement d'archivage de documentation, puis lui-même producteur de cartes dans le courant du XVIIIe siècle. Elle est née d'une décision de Louis XV, demandant d'abord la copie d'une ancienne carte du duché de Rambouillet, et de l'engouement du roi pour la chasse. Elle a été continuée et de plus en plus étendue, en des circonstances favorables, après que le traité de Paris eut mis fin à la guerre de Sept Ans. Enfin, elle a été achevée grâce à l'abnégation et à la ténacité de son réalisateur Jean-Baptiste Berthier, chef des ingénieurs-géographes du Dépôt de la Guerre, qui n'y avait d'abord vu que l'occasion d'occuper son personnel menacé de dissolution par la paix. J.-B. Berthier d'abord soutenu par Choiseul ne retrouvera plus par la suite de contexte si favorable. Les guerres, en éloignant les urgences vers les frontières, réduiront le nombre de ses ingénieurs et finalement lui supprimeront les crédits pour la gravure. Les directeurs du Dépôt de la Guerre et même Alexandre Berthier fils de l'auteur et ministre de la Guerre en 1799, ont tous considéré la Carte des Chasses comme une œuvre futile. La gravure qui avait été décidée par Louis XVI dès 1774, fut arrêtée en 1792 par la Convention alors que 5 feuilles sur 12 étaient achevées. Elle reprit en 1801 sur ordre du Premier Consul Bonaparte et ne sera terminée qu'en 1807. Entre-temps Berthier était mort en 1804 avant l'achèvement complet de l'œuvre à laquelle il avait consacré toute son énergie. Ironie du destin, il n'aura pas la gloire posthume qui désigne familièrement les cartes précédentes du nom de leur auteur.

La première partie Carte des Environs de Rambouillet et de St-Hubert levée en 1764, est composée de 36 minutes au 1/7 200. Elle a été réduite au 1/43 200, puis gravée en 2 feuilles en 1766 par Guillaume de la Haye, l'un des grands maîtres de la gravure des cartes du Dépôt de la Guerre avec déjà celles du Haut Dauphiné et du Diocèse de Cambrai. En fait cette première partie nous intéresse peu, puisque la quasi-totalité est comprise dans la grande carte. Elle est considérée comme un banc d'essai qui donna tant satisfaction au roi qu'il manifesta le besoin de l'étendre aux chasses des environs de Versailles.

La partie principale a été levée au 1/14 400, d'abord de 1767 à 1768 depuis la forêt de Rambouillet jusqu'au méridien de l'Observatoire à l'est et à sa perpendiculaire au nord. Le roi trouvant cette extension insuffisante, il la fit prolonger de 1769 à 1773 vers les forêts de St-Germain, Sénart en englobant Paris et Vincennes. Elle se présente sous forme d'une soixantaine de minutes de terrain (actuellement au S.H.A.T. ), ainsi que de deux assemblages de copies magnifiquement colorées : la partie sud de 1769 de 380 x 209 cm, la partie nord de 1774 de 460 x 205 cm. Elles se trouvent à la salle des Concerts du Pavillon du Roi du Château de Vincennes.

Quant à la carte gravée, si les 5 feuilles achevées en 1792 correspondent bien, à quelques modifications près, aux levés de 1769, il n'en est pas de même des 7 autres feuilles gravées après 1800 par Bouclet, d'Houdan et Tardieu. La feuille de Paris a été révisée de manière particulièrement importante, la ville de Paris mise à jour à l'aide du plan de Verniquet, avec ses extensions urbaines, le mur des fermiers généraux et les canaux de l'Ourcq, St-Denis et St-Martin ajoutés en 1803 d'après plans. La feuille de St-Denis a fait l'objet de nouveaux levés en raison de la présence sur la carte manuscrite d'un cartouche représentant le Château-Neuf de St-Germain-en-Laye. Si la Carte des Chasses est l'un des meilleurs outils pour la connaissance générale de l'occupation du sol au XVIIIe siècle, l'historien devra cependant être prudent dans la datation d'un objet ou avoir recours à la consultation des minutes originales.

Une interrogation demeure sur l'utilité réelle d'un travail si minutieux et coûteux, resté trente années à l'état d'assemblages monumentaux intranspor-tables. Faut-il lui attribuer une valeur de symbole de l'ancien régime, contemplé seulement par le roi et la cour au retour de leurs chasses, carte immobile constituant sa propre finalité ? Dans l'affirmative, une telle limitation serait décevante. En ordonnant l'achèvement de la gravure, Napoléon avait compris, au-delà de sa passion pour la chasse, toute l'aide que la carte pouvait donner à son administration. En ce sens, la prolongation vers l'est fut envisagée et de nouveaux levés, commencés en 1814 par les élèves ingénieurs-géographes, sont restés inachevés.

En 1809, la Carte des Chasses du Roi à Fontainebleau, issue de la compilation de documents révisés par les ingénieurs géographes, a été également gravée par le Dépôt de la Guerre. Elle est à l'échelle un peu plus réduite du 1/34 560 et comporte un répertoire de toponymes. Fin 1814, le Maréchal Berthier, passé au service de Louis XVIII et maintenu dans sa charge de Grand Veneur, fit subir aux différentes cartes des chasses les modifications de noms consécutives au changement de régime. C'est pourquoi la Carte des Chasses de Fontainebleau se vit à tort attribuer le titre de Carte des Chasses du Roi, levée par les Officiers du Corps Royal des Ingénieurs Géographes. Vers 1850, l'ajout de deux voies ferrées avait même été effectuée sur Versailles et Fontainebleau, elles seront heureusement supprimées un siècle plus tard par l'I.G.N., qui détient toujours les cuivres et commercialise les tirages.

Article de Jean-Claude Dupuis paru dans "Trois siècles de Cartographie en Ile de France"
Cahiers de l'IAURIF n°119 dec. 97 co-édité avec l'I.G.N.
Reproduit avec l'aimable autorisation de l'auteur

Sommaire


HTML 5 valide Feuille de style CSS 3 valide